Mais que fait la recherche ? Alors que la sixième extinction de masse perdure et saccélère, les sciences de la conservation nauraient toujours pas trouvé de solution. Pire encore, pour certains, les chercheurs seraient même trop pessimistes, au point de rendre contre-productives les alertes quils lancent. Vraiment ? Cest la question que se sont posés deux chercheurs du CNRS*, ce qui les a amenés à se plonger dans les 12 971 articles de recherche publiés ces 15 dernières années dans les principales revues scientifiques dédiées à la conservation.
Après avoir mis de côté les articles de discussions internes à la discipline, ils ont pu brosser le premier portrait empirique de la production scientifique en matière détat des milieux naturels et des populations, didentification de menaces, de propositions et dévaluations des politiques de conservation.
Leur première conclusion est sans appel. Les principales menaces qui pèsent encore sur la biodiversité sont en réalité connues depuis 40 ans, surnommées « les quatre grands maux » depuis cette époque : (i) la trop forte exploitation des ressources (surchasse ou surpêche par exemple), (ii) la fragmentation de lhabitat des espèces, (iii) lintroduction despèces invasives et enfin (iv) les extinctions en chaîne qui peuvent découler des trois premiers facteurs. Sy ajoutent aujourdhui les changements climatiques qui déséquilibrent plus encore les milieux naturels. La biodiversité « exotique » nest dailleurs pas la seule en danger : la majorité des recherches sintéressent plutôt aux écosystèmes européens, et ont mis en évidence la chute de populations communes comme celles doiseaux dans les campagnes françaises**.
Heureusement, la recherche en conservation porte aussi de bonnes nouvelles : le retour spontané despèces tel le loup en Europe, ou la nette amélioration de situations de crise grâce à des mesures de protection. Les sciences de la conservation ne sont donc ni pessimistes, ni optimistes, mais réalistes. Selon les chercheurs, les propositions de solutions durables, compatibles avec les activités humaines, ne manquent pas. Le frein majeur réside plutôt dans la demande de compromis toujours plus favorables à lexploitation plutôt quà la conservation, malgré des recommandations scientifiques déjà timorées.
*- Laurent Godet du laboratoire Littoral, environnement, géomatique, télédétection (CNRS/EPHE/Université de Bretagne occidentale/Université Caen Normandie/Université d'Angers/Université de Nantes) et Vincent Devictor de lInstitut des sciences de lévolution de Montpellier (CNRS/IRD/EPHE/Université de Montpellier)
**- Les espèces spécialistes de ces milieux, comme l'alouette des champs, la fauvette grisette ou le bruant ortolan, ont perdu en moyenne un individu sur trois en quinze ans. Voir : http://www2.cnrs.fr/presse/communique/5501.htm
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