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Un microscope intelligent prédit les signes de neurodégénérescence

Des scientifiques de l’EPFL ont mis au point un microscope autonome capable de prédire le début de l’agrégation de protéines mal repliées – caractéristique des maladies neurodégénératives – et d’analyser les propriétés biomécaniques

Peer-Reviewed Publication

Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne

Microscope intelligent

image: Illustration de la microscopie intelligente pour la détection des agrégats de protéines. view more 

Credit: 2025 EPFL/Alexey Chizhik

L’accumulation de protéines mal repliées dans le cerveau joue un rôle central dans la progression de maladies neurodégénératives, comme la maladie de Huntington, la maladie d’Alzheimer et la maladie de Parkinson. Mais pour l’œil humain, les protéines destinées à former des agrégats nocifs ne sont pas différentes des protéines normales. La formation de tels agrégats a également tendance à se produire de manière aléatoire et relativement rapide – à l’échelle de quelques minutes. La capacité d’identifier et de caractériser les agrégats de protéines est essentielle pour comprendre et combattre les maladies neurodégénératives.

Grâce à l’apprentissage profond, des scientifiques de l’EPFL ont mis au point un système d’imagerie autonome qui exploite plusieurs méthodes de microscopie pour suivre et analyser l’agrégation des protéines en temps réel, voire l’anticiper avant qu’elle ne commence. En plus d’optimiser l’efficacité de l’imagerie, cette approche minimise l’utilisation de marqueurs fluorescents, qui peuvent altérer les propriétés biophysiques des échantillons cellulaires et nuire à l’exactitude de l’analyse.

«C’est la première fois que nous sommes en mesure de prévoir avec précision la formation de ces agrégats de protéines, déclare Khalid Ibrahim, qui a récemment défendu sa thèse à l’EPFL. Comme leurs propriétés biomécaniques sont liées aux maladies et à la perturbation de la fonction cellulaire, comprendre comment ces propriétés évoluent tout au long du processus d’agrégation permettra d’acquérir des connaissances fondamentales essentielles pour développer des solutions.»

Khalid Ibrahim vient de publier ces travaux dans Nature Communications aux côtés d’Aleksandra Radenovic, responsable du Laboratoire de biologie à l’échelle nanométrique de la Faculté des sciences et techniques de l’ingénieur, et de Hilal Lashuel de la Faculté des sciences de la vie, en collaboration avec Carlo Bevilacqua et Robert Prevedel du Laboratoire européen de biologie moléculaire de Heidelberg, en Allemagne. Ce projet est le fruit d'une collaboration de longue date entre les deux laboratoires de l’EPFL, qui réunissent des compétences complémentaires en matière de neurodégénérescence et de technologies avancées d'imagerie des cellules vivantes. « Ce projet est né de la volonté de mettre au point des méthodes qui révèlent de nouvelles connaissances biophysiques, et il est passionnant de voir comment cette vision a porté ses fruits», déclare Aleksandra Radenovic.

Assister à la naissance d’un agrégat de protéines

Dans le cadre de leur première collaboration, dirigée par Khalid Ibrahim, l'équipe a développé un algorithme d’apprentissage profond qui a permis de détecter des agrégats de protéines matures lorsqu’ils sont présentés avec des images non marquées de cellules vivantes. La nouvelle étude s’appuie sur ces travaux avec une version de classification d’images de l’algorithme qui analyse ces images en temps réel: lorsque cet algorithme détecte un agrégat de protéines matures, il déclenche un microscope Brillouin, qui analyse la lumière diffusée pour caractériser les propriétés biomécaniques de l’agrégat comme l’élasticité.

Normalement, la vitesse d’imagerie lente d’un microscope Brillouin en fait un mauvais choix pour l’étude des agrégats de protéines à évolution rapide. Mais grâce à l’approche basée sur l’IA de l’équipe de l’EPFL, le microscope Brillouin n’est activé que lorsqu’un agrégat de protéines est détecté, ce qui accélère l’ensemble du processus tout en ouvrant de nouvelles perspectives en microscopie intelligente.

«C’est la première publication qui montre le potentiel impressionnant des systèmes autonomes pour intégrer des méthodes de microscopie sans marqueur, ce qui devrait permettre à davantage de biologistes d’adopter des techniques de microscopie intelligente en évolution rapide», affirme Khalid Ibrahim.

Comme l’algorithme de classification d’images ne cible que les agrégats de protéines matures, les scientifiques devaient encore aller plus loin s’ils voulaient détecter la formation d’agrégats. Pour cela, ils ont mis au point un deuxième algorithme d’apprentissage profond et l’ont entraîné sur des images marquées par fluorescence de protéines dans des cellules vivantes. Cet algorithme de détection de «début d’agrégation» peut différencier des images quasi identiques afin d’identifier correctement quand l’agrégation aura lieu avec une précision de 91 %. Une fois ce début d’agrégation détecté, le système autonome réactive l’imagerie Brillouin pour offrir une fenêtre inédite sur l’agrégation des protéines. Pour la première fois, la biomécanique de ce processus peut être capturée dynamiquement au fur et à mesure.

Hilal Lashuel souligne qu’en plus de faire progresser la microscopie intelligente, ces travaux ont d’importantes implications pour la découverte de médicaments et la médecine de précision. « Les méthodes de microscopie sans marqueur créent des moyens entièrement nouveaux d'étudier et de cibler de petits agrégats de protéines appelés oligomères toxiques, dont on pense qu'ils jouent un rôle causal central dans la neurodégénérescence. Nous sommes ravis de nous appuyer sur ces réalisations et d'ouvrir la voie à des plateformes de développement de médicaments qui accéléreront la mise au point de thérapies plus efficaces pour les maladies neurodégénératives. »


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