News Release

La marijuana et la vulnérabilité à la psychose

Peer-Reviewed Publication

University of Montreal

MONTRÉAL, le 5 juillet 2017 - Passer d'une consommation de marijuana occasionnelle à une consommation hebdomadaire ou quotidienne à l'adolescence augmente le risque de 159 % de vivre des expériences psychotiques récurrentes, selon une nouvelle étude canadienne publiée aujourd'hui dans le Journal of Child Psychology and Psychiatry. L'étude rapporte également des effets de la consommation de marijuana sur le développement cognitif et montre que le lien entre la consommation de marijuana et les expériences psychotiques s'explique en partie par une hausse des symptômes liés à la dépression.

«Pour bien comprendre la portée de ces résultats, il est primordial de définir ce que sont les expériences psychotiques, précise la première auteure de l'étude, Josiane Bourque, doctorante au Département de psychiatrie de l'Université de Montréal. Il s'agit d'anomalies sensorielles, d'idées délirantes, de sentiments de persécution qui peuvent être relativement peu fréquents et qui, en soi, ne sont pas problématiques. C'est le fait d'avoir continuellement, année après année, ce genre d'expériences qui accroît le risque de vivre un premier épisode de psychose ou un autre trouble psychiatrique.»

«Nos résultats confirment que devenir un consommateur régulier de marijuana durant l'adolescence est, en effet, associé à un risque de symptômes psychotiques. C'est un important problème de santé publique», poursuit-elle.

Quels sont les mécanismes de ce lien?

Un des objectifs de l'étude était de comprendre le mécanisme par lequel la consommation de marijuana et les expériences psychotiques sont liées. Une des hypothèses avancées par l'équipe du Centre de recherche du CHU Sainte-Justine est que la consommation de cannabis aurait un effet négatif sur le développement des fonctions cognitives à l'adolescence et que ce déficit cognitif serait directement associé à la manifestation d'expériences psychotiques.

Cependant, cette hypothèse n'a été que partiellement confirmée. Parmi les différentes fonctions cognitives étudiées, seule la capacité d'inhibition a été altérée par la consommation de marijuana; c'est une habileté essentielle qui permet à l'individu d'inhiber certaines pulsions ou certains comportements pour adopter une attitude appropriée selon la situation vécue, mentionne Josiane Bourque. L'équipe de recherche a d'ailleurs démontré que la diminution de cette fonction cognitive constitue un facteur de risque dans l'abus de substances et la dépendance.

«Nos résultats montrent que même si la consommation de marijuana est associée à divers déficits cognitifs et symptômes psychiatriques, c'est uniquement l'augmentation de symptômes dépressifs, notamment des pensées négatives et de l'inquiétude, qui pouvait expliquer le lien entre la marijuana et la récurrence des expériences psychotiques chez les jeunes», conclut Josiane Bourque.

Accroître l'efficacité des interventions

Ces découvertes vont avoir des répercussions cliniques majeures dans l'élaboration d'éventuels programmes de prévention chez les jeunes aux prises avec des expériences psychotiques récurrentes. «Alors que la prévention de la consommation de marijuana chez les jeunes devrait faire partie de toutes les stratégies en matière de drogue, des approches ciblées sont essentielles afin de retarder et prévenir la consommation chez ceux à risque de psychose», dit la professeure titulaire du Département de psychiatrie de l'Université de Montréal Patricia Conrod, qui a dirigé cette étude.

Sur ce point, la Mme Conrod reste optimiste: ses ateliers de prévention en contexte scolaire ont déjà prouvé leur efficacité en permettant de réduire la consommation de marijuana de 33 %. «Dans ces futurs programmes, il sera également nécessaire d'aborder la question des pensées négatives et des symptômes dépressifs.»

Une grande cohorte d'adolescents de Montréal

Les résultats de l'étude proviennent du projet Co-Venture, une cohorte d'environ 4000 adolescents de 13 ans issus de 31 écoles secondaires de la grande région de Montréal suivis annuellement tout au long du secondaire. Ainsi, chaque année, les adolescents répondaient (ok?) à des questionnaires informatisés sur la consommation de cannabis et la présence de symptômes psychiatriques. Ils effectuent aussi des tests cognitifs mesurant le quotient intellectuel, la mémoire de travail, la mémoire à long terme et la capacité d'inhibition.

Tout d'abord, l'équipe de recherche a corroboré des résultats tirés de travaux menés au Royaume-Uni et aux Pays-Bas en montrant qu'il existe, chez les adolescents, un petit groupe d'individus (huit pour cent) qui vont rapporter année après année de plus en plus d'expériences psychotiques. Ensuite, les chercheuses ont évalué comment la consommation de marijuana entre 13 et 16 ans augmentait le risque pour un jeune d'appartenir à ce groupe. Enfin, elles ont testé si le lien entre la hausse de la consommation de marijuana et l'accroissement des expériences psychotiques pouvait être expliqué par l'apparition d'une anxiété ou d'une dépression grandissante, ou bien par une diminution des capacités cognitives.

À propos de l'étude

L'article «Cannabis use and psychotic-like experiences trajectories during early adolescence: The coevolution and potential mediators» a été publié dans le Journal of Child Psychology and Psychiatry le 5 juillet 2017.

Cette étude a été financée grâce à une bourse des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) versée à Josiane Bourque, à une bourse du Fonds de recherche du Québec - Santé attribuée à Patricia Conrod, ainsi qu'à une subvention des IRSC accordée à Patricia Conrod et d'autres collaborateurs.

À propos du Centre de recherche du CHU Sainte-Justine

Le Centre de recherche du CHU Sainte-Justine est un établissement phare en recherche mère-enfant affilié à l'Université de Montréal. Axé sur la découverte de moyens de prévention innovants, de traitements moins intrusifs et plus rapides et d'avenues prometteuses en médecine personnalisée, il réunit plus de 200 chercheurs, dont plus de 90 chercheurs cliniciens, ainsi que 385 étudiants de cycles supérieurs et postdoctorants. Le Centre est partie intégrante du Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine, le plus grand centre mère-enfant du Canada et le deuxième centre pédiatrique en importance en Amérique du Nord (recherche.chusj.org).

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Source: Centre de recherche du CHU Sainte-Justine.

Pour plus d'informations :

Mélanie Dallaire
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