image: This is an illustrative creation showcasing the factors that most affect our immune system. view more
Credit: (c) Etienne Patin - Institut Pasteur
Pourquoi chacun de nous répond différemment à une infection ou à un vaccin ? Pourquoi certaines personnes sont allergiques au pollen ? Autant de questions qui restent encore sans réponse en biologie et dans les sciences médicales. Le laboratoire dexcellence Milieu Intérieur, coordonné à lInstitut Pasteur par le Dr Lluis Quintana-Murci, directeur de recherche CNRS, vient de décrire à grande échelle la variation du système immunitaire dans la population française. Le consortium a étudié pour cela une large collection biologique provenant de 1000 Français volontaires, âgés de 20 à 69 ans. Explications.
Limmunologie, la branche de la biologie qui étudie notre système immunitaire, sest longtemps concentrée sur la dissection des mécanismes moléculaires qui régissent notre réponse physiologique aux infections, en considérant cependant quelle ne changeait pas dun individu à lautre. Une hypothèse mise à mal par plusieurs études récentes, suggérant que nous ne sommes pas égaux face aux pathogènes. Notre âge, notre sexe, notre passé infectieux, notre patrimoine génétique, peuvent influencer notre système immunitaire, et nous rendre plus susceptibles aux maladies. Identifier ces facteurs qui modulent notre immunité est devenu lenjeu principal de la médecine de précision, une médecine du futur qui vise à proposer au patient un traitement médical adapté à ses particularités individuelles.
Afin de décrire à grande échelle la variation du système immunitaire dans la population française, une trentaine de scientifiques issus de plusieurs centres de recherche se sont réunis autour dun laboratoire dexcellence (ou LabEx) nommé Milieu intérieur (financé par le programme des Investissements dAvenir), coordonné à lInstitut Pasteur par le Dr Lluis Quintana-Murci, directeur de recherche CNRS. Ce consortium a établi une large collection biologique provenant de 1000 donneurs non-malades recrutés à Rennes, incluant 500 Françaises et 500 Français, âgés de 20 à 69 ans. « Leur sang, leur ADN, leur historique vaccinal et médical, les bactéries vivant dans leur intestin et leur nez, ont été collectés, mesurés et scrutés pour cette vaste étude », explique Lluis Quintana-Murci. Les premiers résultats de l'analyse de cette cohorte entière viennent dêtre publiés dans les revues PNAS du 27 décembre 2017 et Nature Immunology du 23 février 2018.
Variation du système immunitaire et différences de sexe et dâge
A laide dun système ex vivo, les chercheurs ont mesuré, dans les échantillons sanguins des 1000 donneurs, les changements dexpression de gènes de limmunité suite à leur exposition à différents virus, bactéries, et champignons. En parallèle, « nous avons déterminé les caractéristiques moléculaires des globules blancs, ou leucocytes, composant le sang de tous les donneurs, avec une résolution sans précédent », indique Etienne Patin, chercheur CNRS et auteur de cette étude. Les deux études confirment quune grande partie de la variation du système immunitaire entre individus est due à des différences de sexe et dâge. « Mais la consommation de cigarettes, et linfection asymptomatique par le cytomégalovirus, qui concerne 35% de la population, ont également un impact majeur sur notre composition sanguine, ce qui pourrait expliquer que des fumeurs et des personnes infectées par ce virus puissent avoir une plus grande susceptibilité aux infections. »
Variations génétiques et risque de maladies
Les chercheurs ont voulu ensuite déterminer si notre patrimoine génétique pouvait contribuer aux différences de réponse immunitaire entre individus. Résultat surprenant, « nous avons identifié des centaines de variations génétiques qui changent lexpression de molécules clés de la réponse immunitaire, souligne Lluis Quintana-Murci, dont certaines sont associées à un plus grand risque de développer des maladies telles que lallergie aux pollens, le lupus érythémateux, ou encore le diabète de type 1. » Des résultats qui éclairent dun jour nouveau les causes potentielles, encore obscures, de ces pathologies.
Le Laboratoire dExcellence Milieu Intérieur (ou LabEx Milieu intérieur) sapprête maintenant à déterminer si nos flores intestinale et nasale, ainsi que notre épigénétique ces modifications transitoires de notre ADN contribuent elles aussi à nos différences immunitaires. Plus généralement, la large bio-banque générée dans le cadre de ce consortium facilitera lidentification de facteurs de risques aux maladies, ouvrant la voie à une médecine de précision des maladies infectieuses et auto-immunes.
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Source 1
Distinctive roles of age, sex, and genetics in shaping transcriptional variation of human immune responses to microbial challenges, PNAS, 27 décembre 2017.
Piasecka B. et al.
Source 2
Natural variation in innate immune cell parameters is preferentially driven by genetic factors, Nat Immunol, 23 février 2018
Patin E. et al
Journal
Nature Immunology