La douleur neuropathique est une maladie chronique qui affecte 7 à 10 % de la population française et pour laquelle aucun traitement nest efficace. Des chercheurs de lInstitut des neurosciences de Montpellier (Inserm/Université de Montpellier) et du Laboratoire dinnovation thérapeutique (CNRS/Université de Strasbourg)[1] ont mis en évidence le mécanisme responsable de linstallation et du maintien de la douleur. Grâce à leur découverte, ils ont mis au point un prototype de traitement innovant qui montre, sur des modèles animaux, un effet thérapeutique immédiat et durable sur les symptômes douloureux. Cette étude est publiée le 12 mars 2018 dans Nature Communications.
Des chercheurs français viennent de mettre en évidence un rôle inattendu dans la douleur chronique dune molécule particulière, appelée FLT3, connue pour son rôle dans différentes fonctions sanguines et produite par les cellules souches hématopoïétiques à l'origine de toutes les cellules sanguines. La douleur neuropathique est le résultat dune lésion des nerfs périphériques provoquée par des pathologies comme le diabète, le cancer ou le zona ou bien causée par un traumatisme accidentel ou par une intervention chirurgicale. Dans cette étude, les chercheurs ont montré que les cellules immunitaires sanguines qui envahissent le nerf au site de la lésion synthétisent et libèrent une autre molécule, appelée FL, qui saccroche et active FLT3, ce qui déclenche dans le système sensoriel une réaction en chaîne qui est à lorigine de la douleur. Ils ont mis en évidence que FLT3 induit et maintient la douleur en agissant très en amont sur dautres constituants du système sensoriel, connus pour rendre permanente la douleur : cest le phénomène de "chronicisation".
Au-delà de la découverte du rôle de FLT3, les chercheurs ont créé, en passant informatiquement au crible trois millions de configurations possibles, une molécule anti-FLT3 (BDT001) ciblant le site daccrochage de FL. Cette molécule bloque la liaison entre FL et FLT3, empêchant ainsi la chaîne dévénements conduisant à la douleur chronique. Administrée à des modèles animaux, BDT001 a réduit, en trois heures, les symptômes douloureux neuropathiques typiques comme lhyperalgie, une sensation douloureuse accrue, ou lallodynie, une réaction douloureuse à des stimuli normalement non douloureux, avec un effet qui persiste 48 heures après une seule administration.
La douleur neuropathique, qui affecte environ 4 millions de personnes en France, est une maladie invalidante avec un coût social très élevé. Les traitements actuels, essentiellement constitués de médicaments repositionnés, comme les antidépresseurs et les antiépileptiques, sont peu efficaces : moins de 50 % des patients obtiennent une réduction significative de leurs douleurs. De plus, ils peuvent générer des effets secondaires importants. Le développement de linnovation thérapeutique[2] issue de ces travaux de recherche est assuré par la start-up Biodol Therapeutics, qui pourrait ainsi mettre au point la toute première thérapie spécifique des douleurs neuropathiques et, à terme, soulager de nombreuses personnes.
###
Notes:
[1] Ces travaux impliquent également des chercheurs de lInstitut de génomique fonctionnelle (CNRS/Inserm/Université de Montpellier).
[2] Ce projet a notamment été financé par lANR et la SATT AxLR de Montpellier. LInserm a licencié les droits dexploitation des brevets attachés à cette découverte (WO2011/083124 et WO 2016/016370) à Biodol Therapeutics, une jeune start-up installée à Montpellier et Strasbourg et soutenue par la BPI et la Région Occitanie.
Journal
Nature Communications