Plus puissant et plus rapide, le laser à électrons libres (1) European XFEL est inauguré le 1er septembre 2017, près de Hambourg en Allemagne. En produisant des flashs de rayons X ultra-lumineux (mille milliards de photons par flash), deux cent fois plus nombreux par seconde que les meilleurs lasers à électrons libres existants, ce laser européen nouvelle génération permettra aux scientifiques de cartographier les détails atomiques des virus, de déchiffrer la composition moléculaire des cellules, de réaliser des images tridimensionnelles du nanomonde ou encore de filmer des réactions chimiques. Onze pays ont participé à sa construction, pour un budget total de 1,2 milliard deuros. En France, le CEA et le CNRS ont joué un rôle de premier plan dans la conception et la construction de laccélérateur supraconducteur à électrons, au cur de cette nouvelle infrastructure de recherche internationale.
Depuis les années 70, le développement des accélérateurs de particules a permis la production de rayons X notamment grâce au rayonnement synchrotron. Cette technologie, qui est utilisée pour lanalyse structurelle des matériaux, a été affinée avec la construction dinfrastructures de recherche dédiées, comme par exemple, en France, lESRF (Grenoble) et Soleil (Saclay). Les lasers à électrons libres permettent maintenant de sintéresser à de nouveaux phénomènes en produisant une lumière quasiment 100 % cohérente(2), faite de flashs ultra-lumineux (10^12 photons par flash) et ultra-courts (de lordre dune femto-seconde(3)). Pour la production de rayons X, European XFEL, basé en Allemagne près de Hambourg, utilise un accélérateur supraconducteur à électrons permettant dobtenir un nombre de flashs deux cent fois plus grand par seconde que les meilleurs lasers à électrons libres existants. Il permettra de produire 27 000 flashs ultra-lumineux par seconde avec une cohérence de lordre de 100 % de la longueur donde produite. Avec sa longueur de 3,4 km, il sera également le plus grand du monde dans sa catégorie.
Laccélérateur délectrons de European XFEL est unique dans le paysage des sources de lumière : il est le seul à utiliser la supraconductivité. Sa construction a été prise en charge par un consortium dinstituts européens basés principalement en Allemagne, en Russie, en France, en Italie, en Espagne, en Pologne et en Suisse. En France, au-delà des futurs projets qui seront menés par des chercheurs coordonnés par le CNRS, le Laboratoire de l'accélérateur linéaire (CNRS/Université Paris-Sud) a plus particulièrement été chargé du suivi de la production et du conditionnement de tous les coupleurs de puissance(4), composants essentiels des accélérateurs linéaires de particules. Ce travail a nécessité un transfert de savoir-faire de certaines étapes de la préparation des coupleurs vers les industriels, ainsi qu'une collaboration étroite avec ces derniers pour garantir la qualité requise du produit fini. Une infrastructure adaptée à la production de masse des coupleurs, unique au monde, a été installée au laboratoire permettant d'atteindre une cadence de conditionnement de 8 à 10 coupleurs par semaine. Les coupleurs conditionnés ont été ensuite envoyés à lInstitut de recherche sur les lois fondamentales de l'univers du CEA (Paris-Saclay) pour être assemblés dans 103 « cryomodules ». Pour ce travail dintégration dont il avait la charge, le CEA a accompli un transfert industriel de son savoir-faire vers la société Alsyom, formalisé en juillet 2012, et sest doté dune infrastructure dédiée à Saclay, ce qui a permis datteindre une cadence dassemblage dun cryomodule tous les quatre jours, tout en maintenant les performances techniques exigées. Après 8 ans defforts, lanalyse des performances des coupleurs et cryomodules, réalisée par le laboratoire pilote basé en Allemagne (le DESY), confirme un savoir-faire unique au monde des scientifiques français.
European XFEL, dont la première lumière laser a été produite en mai 2017, est aujourdhui capable de produire une lumière avec une intensité suffisante pour caractériser, avec une seule impulsion, des structures à léchelle nanométrique, voire atomique. La durée de ces impulsions, de lordre de la femto-seconde, ainsi que la cohérence de la lumière produite permettront de suivre en temps réel des processus fondamentaux comme la dynamique des structures biologiques, le fonctionnement de nano-objets et de nombreuses réactions chimiques. Sa brillance(5) exceptionnelle permettra par ailleurs de préparer et étudier des états excités de la matière comme on les trouve, par exemple, à lintérieur des planètes.
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En savoir plus :
Sur XFEL et son consortium : https://www.xfel.eu/
Sur le montage des coupleurs de puissances : http://irfu.cea.fr/Phocea/Video/index.php?id=296
Dautres photos sont disponibles sur : https://media.xfel.eu/XFELmediabank/?l=en&c=16055
(1) Un laser à électrons libres (en anglais : Free Electron Laser ou FEL) utilise des électrons qui ne sont pas liés à un atome pour créer des photons. La lumière produite est à la fois cohérente, intense et peut avoir une longueur d'onde située dans une large gamme : micro-ondes, rayons X, ultra-violet, domaine visible ou infrarouge. Ici, le nouveau laser européen permettra de produire des rayons X.
(2) Plus une lumière est cohérente, mieux elle nous informe sur l'organisation de la matière, doù limportance davoir une lumière la plus cohérente possible.
(3) 1 femto-seconde = 1 milliardième de milliardième de seconde = 10^-15 seconde
(4) 850 coupleurs de puissance au total, 700 produits par le consortium européen Thalès-RI et 150 par lentreprise américaine CPI.
(5) Nombre de photons émis par unité de temps, de bande passante, de taille et de divergence.