La mucoviscidose, lune des maladies génétiques les plus fréquentes en Suisse, provoque des troubles respiratoires et digestifs sévères. Malgré des avancées thérapeutiques considérables, cette maladie réduit toujours lespérance de vie des personnes atteintes en raison, notamment, dinfections respiratoires parfois mortelles. Des scientifiques de lUniversité de Genève (UNIGE) ont découvert la raison de ce grand nombre dinfections pulmonaires: une protéine, Vav3, favoriserait ces infections en créant une «station dancrage à bactéries» à la surface des voies respiratoires des personnes atteintes. Inhiber cette protéine empêcherait les bactéries de samarrer à la surface des voies respiratoires et de provoquer des infections à répétition. Ces résultats, à lire dans la revue Cell Reports, ouvrent des perspectives thérapeutiques intéressantes pour limiter les complications respiratoires chez les personnes atteintes de mucoviscidose.
La mucoviscidose, qui touche plus de 700 000 personnes dans le monde, est lune des maladies génétiques les plus fréquentes en Suisse. Elle est due à des mutations dans le gène responsable dune protéine qui participe à la sécrétion de mucus, rendant celui-ci anormalement épais. Laltération de cet unique gène provoque de sévères dysfonctionnements respiratoires et digestifs et limite la qualité comme lespérance de vie des personnes atteintes. Dans les poumons, par exemple, le mucus hyper-visqueux stagne et obstrue les voies respiratoires.
Des infections à répétition
Laccumulation de mucus ne se contente pas dobstruer les voies respiratoires, elle favorise aussi les infections pulmonaires chroniques. Malgré dimportantes avancées thérapeutiques, ces infections pulmonaires restent fréquentes et graves. Elles sont en majorité dues à une bactérie connue pour sa résistance aux antibiotiques, Pseudomonas aeruginosa. «Si lon sait que la viscosité du mucus joue un rôle en retenant les bactéries, la raison pour laquelle elles sarriment si facilement aux voies respiratoires restait inconnue, explique Marc Chanson, professeur au Département de physiologie cellulaire et métabolisme de la Faculté de médecine de lUNIGE. Lancrage de Pseudomonas aeruginosa aux cellules des voies respiratoires est le point de départ de ces infections souvent mortelles. Comprendre ce processus pourrait permettre dempêcher leur apparition.»
Une station dancrage à bactéries
Les chercheurs de lUNIGE ont comparé des cellules des voies respiratoires de personnes malades à des cellules saines. «Tout le projet a commencé quand nous avons constaté que la protéine Vav3, dont aucune implication navait été montrée dans cette maladie jusquà présent, était sur-exprimée dans les cellules malades», senthousiasme Mehdi Badaoui, chercheur dans léquipe de Marc Chanson et premier auteur de ces travaux. Après de nombreuses analyses in vitro, les scientifiques ont découvert le rôle clé de cette protéine: elle dirige la construction dune véritable station dancrage à bactéries. Concrètement, Vav3 force deux autres protéines, la fibronectine et lintégrine b1, à sassocier avec elle à la surface des cellules afin de créer un complexe favorisant les infections par Pseudomonas aeruginosa.
«Cest la première fois quest mis en évidence un mécanisme permettant de créer un micro-environnement favorable à une bactérie avant même son arrivée, souligne Marc Chanson. Cela expliquerait le nombre élevé dinfections pulmonaires chroniques chez les personnes atteintes de mucoviscidose.»
Inhiber Vav3 pour limiter les infections respiratoires
Comment exploiter ce mécanisme à des fins thérapeutiques? En inhibant Vav3 dans des cellules malades, les scientifiques ont réussi à empêcher lexpression des deux autres protéines composant la station dancrage. «Et, effectivement, labsence de cette structure limite ladhésion de Pseudomonas aeruginosa», ajoute Mehdi Badaoui. Bien que le lien exact entre la protéine Vav3 et le défaut génétique à lorigine de la mucoviscidose reste à déterminer, cette découverte constitue une cible thérapeutique prometteuse pour limiter les complications respiratoires. Ces travaux ont pu être menés grâce, notamment, au soutien du Fonds national suisse de la recherche scientifique (FNS) et de la Société suisse pour la mucoviscidose.
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Cell Reports