Connue depuis les années 1960, la colonie de manchots royaux Aptenodytes patagonicus de l'île aux Cochons, dans le sud de l'océan Indien, était réputée pour être la plus grande colonie de manchots royaux au monde et la deuxième plus grande colonie de manchots toutes espèces confondues.
Cependant, en raison de son isolement et de son inaccessibilité, il n'y avait pas eu d'estimations récentes de cette colonie depuis des décennies. Les chercheurs ont utilisé des images satellites haute résolution pour mesurer les changements de taille de la colonie depuis la dernière visite de lîle par une équipe scientifique, en 1982. À lépoque, la colonie comptait 500 000 couples reproducteurs, soit une population de plus de 2 millions dindividus. Pour évaluer les surfaces occupées par les manchots entre 1960 et aujourdhui, ils ont mesuré sur les images satellitaires les contours de la colonie années après années, et se sont rendus compte que celle-ci diminuait au profit dune re-végétalisation. Des clichés pris depuis un hélicoptère lors de lAntarctic Circumpolar Expedition ont permis de confirmer la réduction spectaculaire de la colonie.
Les résultats indiquent que le déclin a débuté à la fin des années 1990, coïncidant avec un épisode climatique majeur dans locéan Austral lié au phénomène El Niño. Cet évènement climatique a affecté temporairement les capacités de recherche de nourriture dune autre colonie située à 100 km de lîle aux Cochons et a provoqué son déclin. Ainsi le même processus pourrait être à luvre sur lîle aux Cochons. De plus, la taille de cette colonie la soumettrait également aux effets dits de « densité-dépendance ». En effet, plus une population est grande plus la compétition entre les individus est rude et ralentit la croissance de tout le groupe. Les effets du manque de nourriture sont ainsi démultipliés et peuvent provoquer un déclin rapide et massif sans précédent, notamment suite à un évènement climatique comme celui de 1990.
La présence de maladies est aussi une hypothèse envisagée, le choléra aviaire décimant actuellement les populations doiseaux de mer sur dautres îles de locéan Indien comme les albatros sur lîle dAmsterdam ou les manchots sur lîle de Marion.
Néanmoins, toutes ces hypothèses semblent insuffisantes pour expliquer une réduction dune telle ampleur. Des études de terrain portées par les chercheurs CNRS, avec l'appui de l'Institut polaire français Paul-Emile Victor et en partenariat étroit avec l'équipe de la réserve naturelle nationale des Terres australes françaises devraient être menées prochainement pour confirmer les premiers éléments quapportent les images satellites.
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Journal
Antarctic Science