Imaginez si les médecins pouvaient établir, des années à lavance, quelles sont les personnes susceptibles dêtre atteintes de démence. De telles capacités pronostiques pourraient donner aux patients et à leur famille le temps de bien planifier et gérer leurs soins et leurs traitements. Grâce à la recherche en intelligence artificielle menée à lUniversité McGill, cette puissance prédictive pourrait bientôt être à la portée des cliniciens aux quatre coins du monde.
Des chercheurs du Laboratoire de neuro-imagerie translationnelle de lInstitut universitaire de santé mentale Douglas de lUniversité McGill ont employé des techniques dintelligence artificielle et des mégadonnées pour développer un algorithme capable de détecter les signes distinctifs de la démence deux ans avant lapparition des premiers symptômes, au moyen dune seule TEP-amyloïde du cerveau chez des patients qui présentent des facteurs de risque de la maladie dAlzheimer. Les données recueillies par les chercheurs figurent dans une nouvelle étude publiée dans la revue Neurobiology of Aging.
Le Dr Pedro Rosa-Neto, coauteur principal de létude, et professeur adjoint aux départements de psychiatrie et de neurologie et neurochirurgie de lUniversité McGill, prévoit que cette nouvelle technique amènera les médecins à modifier leur prise en charge des patients, tout en accélérant grandement la recherche sur le traitement de la maladie dAlzheimer.
« Dans le cadre dessais cliniques, lutilisation de cet outil permettra aux chercheurs de se concentrer exclusivement sur les patients qui présentent un risque élevé dêtre atteints de démence au cours de létude, réduisant ainsi nettement les coûts et le temps nécessaires à la conduite de ces études », dajouter le Dr Serge Gauthier, coauteur principal de létude et professeur de neurologie, de neurochirurgie et de psychiatrie à lUniversité McGill.
La présence de plaques amyloïdes : un biomarqueur de la démence
Les scientifiques savent depuis longtemps déjà quune protéine appelée bêta-amyloïde saccumule dans le cerveau des patients atteints dun déficit cognitif léger (DCL), lequel conduit souvent à la démence. Bien que laccumulation de bêta-amyloïde débute plusieurs dizaines dannées avant lapparition des symptômes de démence, cette protéine ne pouvait auparavant servir de biomarqueur prévisionnel, étant donné que le DCL ne mène pas à la maladie dAlzheimer chez tous les patients.
Dans le cadre de leur étude, les chercheurs de McGill se sont appuyés sur des données de lInitiative en neuro-imagerie de la maladie dAlzheimer (ADNI), un programme de recherche mené chez des patients ayant accepté de se soumettre à des examens dimagerie et autres évaluations cliniques.
Sulantha Mathotaarachchi, un informaticien de léquipe des Drs Rosa-Neto et Gauthier, sest servi des résultats de centaines de TEP-amyloïde effectuées chez des patients atteints de DCL tirés de la base de données de lADNI pour élaborer lalgorithme de léquipe de recherche visant à établir, avec une précision de 84 %, quels patients seront atteints de démence, avant lapparition des premiers symptômes. La recherche se poursuit sur les autres biomarqueurs de la démence qui pourraient être intégrés à lalgorithme dans le but daméliorer les capacités prévisionnelles du logiciel.
« Voilà un bel exemple des bienfaits tangibles que les mégadonnées et la science ouverte peuvent apporter dans le traitement des patients », de mentionner le Dr Rosa Neto, également directeur du Centre de recherche et détudes sur le vieillissement de lUniversité McGill.
Laccès en ligne à ce nouveau logiciel est dores et déjà offert aux chercheurs et aux étudiants, mais son homologation par les autorités de santé publique est requise avant que les médecins puissent lutiliser dans leur pratique clinique. À cette fin, léquipe de recherche de McGill procède actuellement à des essais approfondis en vue de valider lalgorithme auprès de différentes cohortes de patients, tout particulièrement chez ceux qui présentent des affections concomitantes, telles que de petits accidents vasculaires cérébraux.
###
Journal
Neurobiology of Aging