A lheure où près de 3,2 milliards de personnes sont encore exposées au risque de contracter le paludisme, des chercheurs de lInstitut Pasteur, du CNRS et de lInserm ont mis au point expérimentalement un vaccin vivant génétiquement atténué contre Plasmodium, le parasite responsable de la maladie. Pour cela, ils sont parvenus à identifier et éteindre un gène du parasite, le rendant ainsi capable dinduire chez un modèle murin une réponse immunitaire efficace et durable. Ces résultats sont publiés dans le Journal of Experimental Medicine, le 18 juillet 2016.
Le paludisme demeure la maladie parasitaire la plus menaçante pour la population mondiale, malgré les moyens de lutte et de prévention mis en place depuis plus de quinze ans, notamment pour cibler les moustiques vecteurs. En 2015, il a été enregistré environ 214 millions de cas et 438 000 décès dus au paludisme, essentiellement des enfants de moins de cinq ans et des femmes enceintes. Un vaccin efficace serait loutil nécessaire pour lutter contre la maladie. Les difficultés que rencontre la mise au point dun vaccin antipaludique tiennent à la complexité de la biologie du parasite Plasmodium et aux multiples stratégies que le parasite a développées au cours de lévolution pour déjouer la réponse immunitaire de son hôte. Chez les malades, linfection par le parasite est caractérisée notamment par labsence de réponse immunitaire protectrice, alors quune prémunition ne sacquiert quaprès des années dexposition. Linfection entraîne notamment une abolition de la mémoire immunologique.
Léquipe de Salaheddine Mécheri, au sein de lunité de Biologie des interactions hôte-parasite (unité CNRS / Inserm à lInstitut Pasteur), en collaboration avec Robert Ménard (unité dInfection et immunité paludéennes à lInstitut Pasteur), a entrepris une approche vaccinale originale. Ils ont pour cela modifié génétiquement des souches de parasite Plasmodium en éteignant le gène qui code pour la protéine appelée HRF (histamine releasing factor).
Les mutants obtenus, qui nexpriment plus HRF, se sont révélés très efficaces dans le déclenchement de la réponse immunitaire. En effet, labsence de HRF provoque dans le foie et dans la rate une forte augmentation de la production de cytokine IL-6, connue pour ses propriétés stimulantes de la réponse immunitaire. Les animaux sont alors protégés lors de toute réintroduction de parasite Plasmodium, y compris des souches très virulentes. Leur mémoire immunologique, de longue durée, a permis de maintenir chez ces animaux une protection au-delà dune année. De plus, cette protection sapplique quel que soit le stade du cycle de développement du parasite. Enfin, alors que linfection par la souche sauvage (classique) de Plasmodium berghei nengendre ni réponse cellulaire, ni humorale, cette souche vaccinale induit non seulement une réponse cellulaire (cellules T CD4 et CD8) mais également des taux élevés danticorps spécifiques reconnaissant des antigènes parasitaires connus comme étant des cibles vaccinales.
Les mutants HRF obtenus dans cette étude sont les premiers parasites génétiquement modifiés chez lesquels la mutation contrôle directement la réponse immunitaire de lhôte. Le gène ciblé, ou une stratégie analogue stimulant limmunité, pourrait amener à la construction de vaccins vivants contre le paludisme particulièrement efficaces et durables.
« Au cours de ces dernières années, on a pu constater la renaissance de la stratégie de vaccination contre le paludisme reposant sur lutilisation des parasites vivants génétiquement atténués. De ce point de vue, le mutant HRF, grâce à son effet protecteur rapide, durable et polyvalent, constitue un prototype prometteur » commente Salaheddine Mécheri.
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Journal of Experimental Medicine