image: La molécule, qui mesure à peine quelques nanomètres de long, se compose d’un brin d’ADN synthétique capable de transporter un médicament et de le relâcher dans l’organisme à la manière d’un élastique de lance-pierre au moment opportun. view more
Credit: Marco Tripodi
Une équipe internationale composée de chercheurs de lUniversité de Rome Tor Vergata et de lUniversité de Montréal a révélé, dans un article publié cette semaine dans Nature Communications, avoir modélisé et synthétisé à léchelle nanométrique une molécule en forme de lance-pierre faite dADN qui est 20 000 fois plus petite quun cheveu humain. Ce «lance-pierre moléculaire» serait en mesure de propulser des médicaments à des endroits précis du corps humain en présence de biomarqueurs propres à une maladie.
La molécule, qui mesure à peine quelques nanomètres de long, se compose dun brin dADN synthétique capable de transporter un médicament et de le relâcher dans lorganisme à la manière dun élastique de lance-pierre au moment opportun. Les deux extrémités de cet «élastique» dADN sont constituées de groupements de liaison capables de se fixer à un anticorps spécifique, soit une protéine en forme de Y utilisée par le système immunitaire pour détecter et neutraliser différents agents pathogènes comme des bactéries et des virus. Lorsque les groupements de liaison du lance-pierre reconnaissent un anticorps spécifique et se fixent à ses branches, «lélastique» dADN sétire et le médicament quil transportait est relâché.
«Lune des propriétés les plus extraordinaires de ce lance-pierre moléculaire est quil réagit seulement lorsquun anticorps spécifique reconnaît les sites de liaison de lélastique dADN, explique Francesco Ricci, professeur de chimie à lUniversité de Rome Tor Vergata. Il est possible de configurer le lance-pierre de manière quil libère un médicament donné en présence danticorps propres à une maladie simplement en modifiant la structure de ces sites. Comme les anticorps sont des biomarqueurs spécifiques de différentes maladies, les médecins cliniciens pourraient faire de cette molécule une arme redoutable à utiliser pour des traitements ciblés.»
«Une autre propriété extrêmement intéressante de notre lance-pierre est sa grande adaptabilité, ajoute Alexis Vallée-Bélisle, professeur au Département de chimie de lUniversité de Montréal. À ce jour, nous avons seulement fait la démonstration du principe de fonctionnement du lance-pierre en le mettant en présence de trois anticorps, dont un anticorps du VIH, et en utilisant des acides nucléiques comme modèles de médicaments. Toutefois, étant donné quil est très facile de créer des transporteurs spécifiques avec la chimie de lADN, on peut configurer lélastique du lance-pierre de façon quil propulse un large éventail de molécules thérapeutiques.»
«Concevoir le design de cette molécule en forme de lance-pierre fut un grand défi, affirme Simona Ranallo, chercheuse postdoctorale au sein du groupe du professeur Ricci et première auteure de létude. Il nous a fallu de nombreux essais-erreurs avant de trouver la configuration qui permettait un transport et un relarguage optimaux du médicament. En effet,la molécule devait pouvoir «retenir » le médicament en labsence de lanticorps, mais aussi être capable de le propulser une fois lanticorps produit.»
Le groupe de chercheurs souhaite maintenant adapter le lance-pierre pour permettre ladministration de médicaments pertinents sur le plan clinique et démontrer son efficacité en contexte réel. «Nous pensons que des lance-pierres moléculaires semblables pourront être utilisés dans un avenir rapproché pour administrer des médicaments à des endroits précis de lorganisme. Si nous parvenons à nos fins, lefficacité des médicaments sen trouvera grandement améliorée et leurs effets secondaires toxiques réduits», conclut M. Ricci.
La prochaine étape du projet consiste donc à cibler une maladie et un médicament particuliers pour lesquels adapter le lance-pierre thérapeutique afin de le tester sur des cellules in vitro, avant de passer aux essais sur des souris.
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À propos de cette étude
Ranallo, S., et autres. Antibody powered nucleic acid release using a DNA-based nanomachine, Nature Communications, avril 2017. doi: 10.1038/ncomms15150
Carl Prévost-Tremblay (UdeM) et Andrea Idili (UofT) sont aussi co-auteurs de cette étude.
Cette étude a été financée par lAssociazione Italiana per la Ricerca sul Cancro (projet no 14420), le Conseil européen de la recherche (projet no 336493), lInternational Research Staff Exchange Scheme, le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (subvention no 436381-2013) et la Chaire de recherche du Canada en bio-ingénierie et bio-nanotechnologie, Tier II (AVB).
Journal
Nature Communications