Liège-Paris, 11 décembre 2017 Les études épidémiologiques montrent que le ftus infecté in utero par le virus Zika encourt un risque de microcéphalie, une malformation congénitale du cerveau irréversible caractérisée par un développement incomplet du cortex cérébral. Cependant le mécanisme de la microcéphalie associée au virus Zika reste méconnu. Pour la première fois, une équipe internationale de chercheurs, réunis au sein du consortium européen ZIKAlliance (coordonné par lInserm), a identifié un mécanisme spécifique entraînant cette microcéphalie. Leurs travaux sont publiés cette semaine dans Nature Neuroscience.
Pour comprendre ce mécanisme, léquipe scientifique menée par le Dr Laurent Nguyen (frs-F.N.R.S., GIGA Neuroscience, Université de Liège) et le Pr Marc Lecuit (Institut Pasteur, Inserm, Université Paris Descartes, hôpital Necker-Enfants Malades, AP-HP) a combiné des analyses de ftus humains infectés par le virus Zika, de cultures de cellules-souches neuronales humaines et dembryons de souris. Les résultats montrent quune infection par le virus Zika des cellules souches neuronales qui contrôlent la neurogenèse déclenche le stress du réticulum endoplasmique (siège de la synthèse de certaines des protéines et des lipides de la cellule) dans les cerveaux embryonnaires, en induisant des signaux en réponse à la conformation incorrecte des protéines.
Lorsquil atteint le cerveau, le virus Zika infecte dune part les cellules-souches neuronales qui vont ainsi générer moins de neurones, et dautre part, en induisant un stress chronique du réticulum endoplasmique, il favorise lapoptose, cest-à-dire la mort précoce de ces cellules neuronales. Ces deux mécanismes cumulés expliquent pourquoi le cortex cérébral des ftus infectés devient déficitaire en neurones et est donc de taille réduite.
« Ces découvertes démontrent une hypothèse que nous avions émise à la suite dune étude fondamentale réalisée au préalable au sein de notre laboratoire, et confirme ainsi limportance physiologique de la réponse à la conformation incorrecte des protéines dans le contrôle de la neurogenèse », explique Laurent Nguyen.
Les chercheurs ont poursuivi leurs études chez la souris en administrant des inhibiteurs de la réponse au repliement incorrect des protéines au sein de cellules souches neuronales, et ils ont constaté que cette opération empêchait le développement de la microcéphalie dembryons de souris infectés par le virus Zika.
Par ailleurs, les défauts observés sont spécifiques à linfection par le virus Zika, car dautres virus neurotropes de la famille des flavivirus (virus du Nil occidental, de la fièvre jaune, ...) ne causent pas de microcéphalie.
Pour le Pr Marc Lecuit, « ces résultats illustrent combien létude des processus biologiques fondamentaux est une étape indispensable à la compréhension des mécanismes des infections, et permettent dentrevoir des débouchés thérapeutiques. »
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A propos du virus Zika
Linfection par virus Zika est une maladie transmise par les moustiques, similaire à la dengue, la fièvre jaune ou la maladie du Nil occidental. Bien que l'infection entraîne souvent chez ladulte des symptômes bénins, y compris de la fièvre et une éruption cutanée, il a été démontré ces derniers mois que le virus Zika peut être transmis de la mère à son ftus, et provoquer des microcéphalies. Il peut également être la cause de paralysies graves pouvant atteindre les muscles respiratoires et entraîner la mort chez ladulte (syndrome de Guillain-Barré).
UE : 45 millions deuros pour la recherche et la prévention du virus Zika
L'UE soutient la recherche afin de développer des traitements, des diagnostics et des vaccins ainsi qu'une meilleure évaluation des risques pour le virus Zika. La majorité du financement (30 millions ) est consacré à trois consortiums de recherche : ZikaPLAN (11 M ), coordonné par l'Université d'Umeå en Suède, ZIKAction (7 M ), coordonné par la Fondation PENTA en Italie, et ZIKAlliance (12 M ), coordonné par l'Inserm en France. Des chercheurs européens mais aussi du Brésil, d'autres pays d'Amérique latine et des Caraïbes collaborent dans ces consortiums pour mieux connaître l'infection par le virus Zika et ses conséquences pour les femmes enceintes, les nouveau-nés et les adultes, ainsi que pour développer des tests de diagnostic améliorés et déterminer les meilleures options pour le traitement et la prévention. Plus dinfos : http://www.zikalliance.tghn.org @ZIKAlliance
Journal
Nature Neuroscience