En médecine, le pouvoir de lintelligence artificielle (IA) réside dans sa capacité à détecter des tendances statistiques dans de grands ensembles de données. Une étude majeure publiée aujourdhui vient démontrer comment lIA peut orienter les patients ayant une tumeur au cerveau et leurs médecins dans leurs choix thérapeutiques.
Le méningiome qui prend naissance dans les membranes entourant le cerveau et la moelle épinière est le type de tumeur du système nerveux central le plus courant, avec 8,14 cas par 100 000 personnes. Si le pronostic est généralement meilleur que pour les autres tumeurs cérébrales, le degré de virulence est très variable. Cest pourquoi il est extrêmement important de savoir prédire la malignité et le temps de survie pour déterminer si lintervention chirurgicale est la meilleure option pour le patient.
Dans cette étude, des chercheurs du Neuro (Institut et hôpital neurologiques de Montréal) et de lHôpital de Montréal pour enfants du Centre universitaire de santé McGill ont entraîné des algorithmes dapprentissage automatique à partir des données de plus de 62 000 patients ayant un méningiome. Lobjectif était de déceler des associations statistiques entre la malignité, le temps de survie et dautres variables cliniques de base telles que la taille de la tumeur, son emplacement et la nature de lintervention chirurgicale effectuée.
Bien que létude prouve la valeur prédictive des modèles pour chaque patient pris individuellement, les chercheurs insistent sur la nécessité de perfectionner les algorithmes à laide densembles de données plus riches, dont des données moléculaires et dimagerie cérébrale.
Léquipe de recherche a créé une application ouverte pour téléphone intelligent qui permet aux cliniciens et aux autres chercheurs dessayer par eux-mêmes les algorithmes prédictifs quelle décrit dans son article. Elle espère que la nature entièrement libre et ouverte de lapplication favorisera, dans le cadre de projets futurs, lutilisation des nouveaux algorithmes dapprentissage automatique sur le terrain. Lapplication est accessible ici, aux fins de démonstration seulement : http://www.meningioma.app.
Jeremy Moreau, doctorant et auteur principal de létude, explique que lapplication vise à rendre les modèles prédictifs accessibles au clinicien moyen. Même si loutil devra être retravaillé avant de servir en contexte réel, létudiant-chercheur affirme quen le mettant entre les mains des médecins, son équipe peut obtenir leurs suggestions daméliorations.
« Beaucoup de gens nous ont expliqué comment ils utilisaient lapplication pour se figurer linfluence des différents facteurs cliniques sur la malignité et la survie, poursuit le doctorant. Nous la voyons comme un point dentrée unique pour accroître lapplicabilité et la transparence des modèles dapprentissage automatique, trop souvent impossibles à évaluer pour le clinicien moyen, qui ne dispose ni du temps ni des connaissances en programmation nécessaires. »
Létude a été publiée le 30 janvier 2020 dans la revue npj Digital Medicine. Financée par la fondation du Département de neurochirurgie, elle a aussi été possible grâce au Fonds dexcellence en recherche Apogée Canada, qui a versé une subvention à lUniversité McGill pour son programme Cerveau en santé, vie en santé. Jeremy Moreau a également reçu des bourses de formation du Fonds de recherche du Québec Santé (FRQS) et de la Fondation des étoiles. Ses travaux sont supervisés par Sylvain Baillet, neuroscientifique au Neuro, et le Dr Roy Dudley, clinicien-chercheur à lHôpital de Montréal pour enfants. Les données des patients proviennent de la base de données du programme Surveillance, Epidemiology, and End Results du National Cancer Institute.
###
Journal
npj Digital Medicine