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Un ralentissement de la division cellulaire cause la microcéphalie

Des scientifiques de l’UNIGE démontrent comment la mutation d’un seul gène peut ralentir la division cellulaire et conduire à un cerveau anormalement petit.

Peer-Reviewed Publication

Université de Genève

La naissance d’un être humain requiert des milliards de divisions cellulaires pour passer d’un ovule fécondé à un bébé. A chacune de ces divisions, le matériel génétique de la cellule mère se duplique pour se répartir équitablement entre les deux nouvelles cellules. Dans le cas de la microcéphalie primaire, une maladie génétique rare mais grave, le ballet de la division cellulaire est déréglé, empêchant le développement adéquat du cerveau. Des scientifiques de l’Université de Genève (UNIGE), en collaboration avec des scientifiques chinois, ont mis en évidence comment la mutation d’une seule protéine, WDR62, empêche le réseau de câbles chargé de séparer le matériel génétique en deux de se former correctement. Comme la division cellulaire est alors ralentie, le cerveau n’a pas le temps de se construire entièrement. Ces résultats, à lire dans le Journal of Cell Biology, apportent un nouvel éclairage sur le fonctionnement de la division cellulaire, un phénomène également impliqué dans le développement des cancers.

La division cellulaire est un mécanisme essentiel au développement de tout nouvel être vivant. Réglée avec précision, elle requiert coordination et contrôle. Des câbles appelés microtubules permettent de répartir équitablement entre les deux cellules filles le matériel génétique empaqueté dans les chromosomes. «Ces microtubules s’assemblent et se désassemblent continuellement pour atteindre leur taille adéquate à chaque instant», explique Patrick Meraldi, professeur au Département de physiologie cellulaire et métabolisme de la Faculté de médecine de l’UNIGE et coordinateur du Centre de recherche translationnelle en onco-hématologie (CRTOH), qui a dirigé ces travaux. «Pour réguler leur taille, la cellule utilise une protéine, la katanine (du japonais katana — sabre) dont le rôle est de couper les microtubules à la bonne longueur.»

Une mutation mineure aux graves conséquences

La mutation de l’un ou l’autre des gènes impliqués dans la division cellulaire suffit à provoquer un cerveau anormalement petit et de graves problèmes neuronaux, limitant fortement l’autonomie des personnes atteintes. La microcéphalie primaire est souvent liée à des unions consanguines et touche entre 1 personne sur 30’000 et 1 sur 250’000 selon les régions du monde.

Mais comment une seule mutation peut-elle avoir des conséquences aussi graves? Et pourquoi, si le gène muté est à tel point essentiel, n’impacte-t-il que le développement du cerveau? Des premiers éléments de réponse à ces questions sont apparus il y a quelques années, lorsque des scientifiques ont découvert que le gène le plus fréquemment muté dans la microcéphalie, ASPM, est impliqué dans la localisation et le fonctionnement de la katanine, le sabre moléculaire chargé de couper les microtubules. «Mais était-ce là le mécanisme central de la microcéphalie ou seulement le cas particulier de cette mutation?» s’interrogeait alors Amanda Guerreiro, post-doctorante dans le laboratoire de Patrick Meraldi et première auteure de l’étude.

La katanine, un sabre moléculaire essentiel

Des expériences dans des cellules cultivées in vitro ont mis en évidence le fait que le deuxième gène le plus fréquemment impliqué dans les cas de microcéphalie, WDR62, était, comme ASPM, nécessaire à la localisation et au fonctionnement de la katanine. De même, les scientifiques ont observé que si la katanine n’agissait pas au bon endroit et au bon moment, les microtubules deviennent anormalement longs. L’espace étant restreint, ils doivent alors se compresser et prennent une forme de S plutôt que de former des câbles droits et tendus. En conséquence, lorsque les microtubules doivent tirer les chromosomes pour les répartir équitablement dans les deux nouvelles cellules, la tension n’est pas assez forte et certains chromosomes ne peuvent pas se déplacer à la même vitesse que les autres. Un léger dérèglement de la mécanique de la division cellulaire suffit à ralentir la répartition des chromosomes et, ce retard étant considéré par les cellules comme un dysfonctionnement grave, la plupart d’entre elles vont mourir. La mort d’un trop grand nombre de cellules aurait alors pour conséquence la taille anormalement petite du cerveau des personnes atteintes de microcéphalie primaire.

«La katanine semble être le mécanisme central de cette maladie du développement», souligne Patrick Meraldi. «Les perspectives de nos travaux sont cependant bien plus vastes: le même mécanisme permet en effet de comprendre comment les cellules cancéreuses modifient le système pour se diviser sans fin et proliférer dans l’organisme.»

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