Certaines fusées de lAgence spatial européenne (ESA) décollent vers lespace avec le soutien de lInstitut Paul Scherrer PSI. Des images réalisées au PSI garantissent lassurance qualité de composants des lanceurs de type Ariane 5 et Vega, en coopération avec lentreprise Dassault Aviation. Les chercheurs du PSI utilisent les neutrons générés à la source de neutrons SINQ pour radiographier des composants dits pyrotechniques qui sont intégrés dans les fusées de lASE. Ces composants servent de cordeaux détonants ou de charge dallumage et assurent, entre autres, le largage des boosters au centième de seconde près. Le lancement dAriane du 20 juin a également impliqué des composants qui avaient été analysés au PSI.
La source de neutrons de lInstitut Paul Scherrer PSI permet détudier certains composants avant que ces derniers ne soient intégrés aux lanceurs de type Ariane 5 et Vega. Ces fusées développées par lAgence spatiale européenne (ASE) acheminent dans lespace des satellites et dautres engins spatiaux non habités. Les éléments analysés au PSI sont ce quon appelle des composants pyrotechniques qui jouent un rôle décisif pendant le vol de la fusée: remplis dexplosif, ils agissent soit comme un cordeau détonant, soit pour déclencher une série deffets souhaités. Les éléments qui ont assuré le décollage réussi de la fusée Ariane 5 le 20 juin dernier avaient eux aussi été analysés au PSI plusieurs mois auparavant.
Des neutrons au service de lassurance qualité
Les composants pyrotechniques utilisés dans les fusées Ariane 5 et Vega sont faits dune gaine métallique remplie dun explosif. «Les transmissions de signaux pyrotechniques fonctionnent comme dans un effet domino», explique Christian Grünzweig, physicien et membre du groupe de recherche Imagerie neutronique et matériaux appliqués au PSI. Une fois déclenché allumé en loccurrence le signal passe plus loin et déclenche dautres détonations le long de la ligne de manière ciblée. «Et comme avec les dominos, une fois que cest terminé, ça lest pour de bon: les composants pyrotechniques ne peuvent vivre quune seule combustion, souligne le chercheur. Il est impossible de tester en amont sils vont fonctionner de manière fiable.»
Les radiographies classiques ne sont pas suffisantes pour procéder à un contrôle, car les rayons X ne peuvent pratiquement pas traverser les métaux. «Mais la bonne nouvelle, poursuit Christian Grünzweig, cest que notre imagerie neutronique peut souvent être utilisée là où les rayons X échouent.» Les neutrons qui sont les composants de charge électrique nulle des atomes traversent en effet sans difficulté la plupart des métaux, y compris le plomb. «Lexplosif, en revanche, contient notamment des atomes dhydrogène qui affaiblissent nettement le faisceau de neutrons, ce qui met lexplosif en évidence sous forme de contraste sombre, précise encore le chercheur. Bref, il ny a que les neutrons qui permettent de visualiser de lexplosif protégé par du métal.»
Les radiographies neutroniques sont ensuite analysées par des collaborateurs du constructeur aéronautique Dassault Aviation. Ces derniers vérifient par exemple si lexplosif a été introduit comme prévu et sans défaut dans les composants. Ce point est décisif, car une imperfection dans la répartition de lexplosif interromprait leffet domino lors de la combustion, ce qui rendrait les composants inutilisables. Le lancement récent de la fusée a été le premier effectué depuis la signature en avril de cette année dun accord officiel de coopération entre le PSI et Dassault Aviation.
Jusquau largage du satellite
Même si de prime abord la juxtaposition des éléments pyrotechniques ressemble à un simple cordeau détonant, sa mission dans la navigation spatiale est autrement plus complexe. Alors que des cordeaux détonants assurent une simple propagation du signal, il existe encore une multitude dautres composants pyrotechniques. Certains multiplient le signal: à un cordeau entrant succèdent jusquà neuf cordaux sortants et donc neuf signaux sortants. À dautres endroits, des cordeaux détonants forment des boucles pour transmettre le signal en différé jusquà un lieu donné. Là, ils déclenchent ensuite de minuscules détonations, au terme desquelles des lames, par exemple, sectionnent certaines attaches correspondantes. De cette manière, les deux boosters qui forment ensemble le premier niveau daccélération sont largués de manière parfaitement synchronisée. Le revêtement protecteur de la charge utile est largué de manière analogue pendant la suite du vol de la fusée. Quant à la charge utile proprement dite, cest-à-dire le satellite ou un autre engin spatial, elle est finalement larguée du lanceur par le biais dune autre détonation.
«Plusieurs processus décisifs sont intégralement initiés par les éléments pyrotechniques, dont lallumage initial se produit au moment du lancement de la fusée», explique David Mannes, chercheur lui aussi du groupe Imagerie neutronique et matériaux appliqués au PSI.
Les avantages divers et variés de limagerie neutronique
Limagerie neutronique nest possible que dans quelques centres de recherche dans le monde et, en Suisse, elle lest uniquement au PSI où elle est établie depuis de nombreuses années et accessible à lindustrie. Avec cette méthode, il est possible de visualiser lintérieur de matériaux et de composants sans endommager ces derniers, ce qui permet de répondre à toutes sortes de questions dordre scientifique ou encore de résoudre certains problèmes rencontrés dans le domaine technique et dans lindustrie. Les radiographies neutroniques dun buste en or de lempereur romain Marc Aurèle datant du IIe siècle apr. J.-C. ont ainsi permis, par exemple, de mettre en évidence de nouveaux éléments de connaissances sur le procédé utilisé pour sa fabrication. Des images réalisées par Christian Grünzweig et David Mannes ont aidé lindustrie pharmaceutique à comprendre les processus qui se jouent lors du stockage de seringues préremplies. Quant au site ABB de Wettingen, en Argovie, grâce à des radiographies neutroniques réalisées au PSI, il a pu bénéficier de certaines recommandations pour augmenter sa production de composants céramiques.
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Texte: Institut Paul Scherrer/Laura Hennemann
Des images peuvent être téléchargées sur http://psi.ch/node/xyz.
Informations complémentaires Recherche avec des neutrons au PSI: https://www.psi.ch/fr/media/recherche-avec-des-neutrons
Contacts
Dr Christian Grünzweig
Laboratoire de diffusion neutronique et dimagerie
Institut Paul Scherrer, 5232 Villigen PSI, Suisse
Téléphone: +41 56 310 46 62
E-mail: christian.gruenzweig@psi.ch [allemand, anglais]
Dr David Mannes
Laboratoire de diffusion neutronique et dimagerie
Institut Paul Scherrer, 5232 Villigen PSI, Suisse
Téléphone: +41 56 310 46 10
E-mail: david.mannes@psi.ch [allemand, anglais]