Les microbes colonisent lensemble des surfaces de notre corps et participent au bon équilibre de notre système immunitaire. Chez les nouveau-nés, le microbiote intestinal est dabord formaté par les composants du lait maternel. Lors de la diversification alimentaire, il se développe et de nombreuses bactéries prolifèrent. Des chercheurs de lInstitut Pasteur et de lInserm montrent chez la souris quune réponse immunitaire importante se produit lors de lintroduction de nourriture solide et du développement du microbiote. Mais surtout, ils ont montré que cette réaction immunitaire était essentielle car elle participe à léducation du système immunitaire, et permet, à lâge adulte, une faible susceptibilité aux maladies inflammatoires (allergies, colites, maladies auto-immunes, cancer). Ces résultats seront publiés dans la revue Immunity, le 19 mars 2019.
Lintroduction dune hygiène de qualité au milieu du XIXe a drastiquement fait diminuer la mortalité due aux maladies causées par des micro-organismes. Dans nos sociétés industrielles actuelles, lhypothèse hygiéniste affirme désormais que la réduction de lexposition en bas âge aux microbes entraînerait une augmentation de la sensibilité aux maladies allergiques ou auto-immunes. De précédentes études ont montré que la perturbation du microbiote, notamment par lexposition aux antibiotiques, peut se traduire par des réponses allergiques . Chez le nouveau-né, la constitution du microbiote se fait lors de laccouchement par lacquisition des bactéries de la mère mais aussi, grâce à la composition du lait maternel. Il est alors majoritairement composé de bifidobacteria et de lactobacilles. A lintroduction de nouveaux aliments dans le régime, le microbiote prolifère et le nombre de bactéries augmente de 10 à 100 fois. Des chercheurs (Ziad Al Nabhani et ses collègues) de lunité Microenvironnement et Immunité (Institut Pasteur/Inserm) dirigée par Gérard Eberl, ont découvert chez la souris que ce phénomène était accompagné dune réponse immunitaire intense. « Nous avons pu montrer que ce mécanisme se produisait dans une fenêtre de temps très spécifique : entre 2 et 4 semaines chez la souris ce qui correspondrait à 3 et 6 mois chez lhomme » explique Gérard Eberl, principal auteur de létude. « Nous avons ensuite supposé que lexistence dune fenêtre de temps déterminée indique que la réponse immunitaire est programmée dans le temps et possède de ce fait une fonction unique dans le développement du système immunitaire » poursuit Gérard Eberl. En effet, les chercheurs ont pu démontrer quen traitant les souris par antibiotiques sur la fenêtre critique de la réponse immunitaire, elles étaient par la suite plus sujettes à développer certaines maladies inflammatoires : les allergies intestinales, le cancer colorectal et les colites. Ainsi, le microbiote une fois détruit par les antibiotiques, on constate que la réaction immunitaire ne se produit pas. « Cest ce que lon appelle lempreinte pathogénique » explique Gérard Eberl, « cest-à-dire que des évènements se produisant dans la prime enfance déterminent une future susceptibilité aux maladies inflammatoires ».
Les chercheurs ont également pu mettre en évidence la présence des cellules spécifiques au moment de cette réaction et qui participent au bon fonctionnement des réponses immunitaires : les cellules T régulatrices (Tregs), des modulateurs clés sans lesquelles les réponses immunitaires sont exacerbées, entraînant par la suite des maladies inflammatoires.
Lensemble de ces données montre limportance dune exposition précoce au microbiote, ciblée dans le temps, pour le développement dun système immunitaire équilibré. « Nous aimerions maintenant valider ces résultats sur linfluence du microbiote au moment de la diversification alimentaire sur lapparition dautres types de pathologies comme les maladies neurodégénératives par exemple » conclut Gérard Eberl.
Ces travaux ont été financés par lInstitut Pasteur et lInserm, mais également par lAssociation François Aupetit, la Crohns Colitis Foundation of America, lEuropean Crohns and Colitis Organisation, la Fondation pour la Recherche Médicale, Janssen, et la Fondation Kenneth Rainin.
Ces travaux ont été menés dans le cadre du programme transversal "Microbiote" mis en place en 2016 dans le cadre du plan stratégique de l'Inserm.
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Immunity