Et si les comportements sociaux pouvaient influencer la progression des maladies, même non contagieuses ? Cest ce quont mis en évidence des équipes françaises du CNRS (1), avec le soutien de lIRD, de lUniversité Paris-Sud, du CEA et de lUniversité de Montpellier, ainsi que de collègues espagnols et australiens. En utilisant un modèle de cancer intestinal chez la mouche, leurs travaux montrent quoutre limpact négatif de lisolement social sur la progression de la maladie, la composition du groupe dans lequel lindividu évolue joue également un rôle. Cette étude est publiée le 3 septembre 2018 dans la revue Nature Communications.
Chez bon nombre danimaux, humains compris, les comportements sociaux à lintérieur dun groupe peuvent avoir un rôle capital dans la survie des individus. Limpact des échanges interindividuels sur la propagation des maladies transmissibles est bien reconnu mais quen est-il du lien entre interactions sociales et progression de maladies non-transmissibles comme le cancer ? Les chercheurs ont abordé cette question en utilisant comme modèle biologique la mouche du vinaigre Drosophila melanogaster, dont il est facile de contrôler lenvironnement social et chez qui linduction expérimentale dune pathologie (ici un cancer intestinal) est aisée. Ils ont ainsi cherché à comprendre si lenvironnement social vécu par lindividu malade affecte la vitesse de progression de sa tumeur, mais aussi si lindividu est capable de choisir lenvironnement social qui minimise la progression de sa maladie.
Dans ce contexte, ils ont observé quune mouche malade maintenue en isolement social voit sa maladie progresser plus rapidement que si elle interagit avec dautres mouches. De façon plus surprenante, la structure même du groupe peut influencer la dynamique de la progression tumorale. Lorsquune mouche malade est en compagnie de mouches saines, la progression de sa tumeur est plus rapide que si elle interagit avec dautres individus malades. Des analyses fines des interactions entre les individus, suivies par vidéo, suggèrent que la mouche malade, en présence dindividus sains, reste dans une forme disolement social.
De façon intéressante, lorsque le choix est donné à une mouche malade de rejoindre un groupe malade ou un groupe sain, celle-ci va préférer la compagnie des mouches malades du moins dans les stades précoces de sa maladie. Car lorsque la tumeur est déjà avancée, cette préférence ne sexprime plus. Le comportement des mouches saines est quant à lui différent : tandis quelles ne font aucune distinction lorsque la maladie est à son début, elles vont en revanche éviter les mouches malades dans des stades plus avancés et rejoindre le groupe d'individus sains. Les raisons précises de cet évitement sont encore mal comprises et en cours détude. Il pourrait sagir dune réponse non spécifique liée aux risques que représentent les pathologies en général, tels que la contagion, la baisse des capacités reproductives ou la vulnérabilité vis-à-vis des prédateurs.
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Ces travaux, qui à ce stade ne permettent aucune transposition à lhumain, suggèrent que lenvironnement social joue un rôle important, voire majeur, dans la progression dune pathologie comme le cancer.
(1) Laboratoires impliqués : Evolution, génomes, comportement et écologie (CNRS/IRD/Université Paris-Sud), Institut de biologie intégrative de la cellule (CNRS/Université Paris-Sud/CEA) et Maladies infectieuses et vecteurs : écologie, génétique, évolution et contrôle (CNRS/IRD/Université de Montpellier).
Journal
Nature Communications