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Chercher les signes de burn-out dans la sueur

Peer-Reviewed Publication

Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne

Nous nous sommes déjà tous sentis stressés, que ce soit dans notre vie professionnelle ou privée ou face à une situation donnée, comme la crise sanitaire du Covid-19. Cependant, impossible d’estimer notre niveau de stress de manière quantitative et objective.

Cela pourrait bien changer, grâce à un mini-capteur portatif mis au point par des chercheurs du Laboratoire des dispositifs nanoélectroniques de l’EPFL (Nanolab) et de la start-up Xsensio. Se posant à même la peau, celui-ci est capable de mesurer le niveau de cortisol, biomarqueur principal du stress, dans la transpiration.

Les deux facettes du cortisol

Le cortisol est une hormone stéroïdienne fabriquée par les glandes surrénales à partir du cholestérol. Sa sécrétion dépend d’une autre hormone produite par l’hypophyse dans le cerveau: l’ACTH (adrénocorticotrophine). Il remplit des fonctions essentielles comme la régulation du métabolisme, de la glycémie et de la pression artérielle et a un impact sur le système immunitaire et les fonctions cardiovasculaires.

Cette hormone est aux commandes lorsque notre organisme doit réagir à une situation de stress, que celle-ci soit vitale ou tout à fait banale. Elle permet de mobiliser l’énergie nécessaire pour nourrir le cerveau, les muscles ou le cœur. «La sécrétion de cortisol peut être pulsatile: on se sent bien et tout à coup quelque chose se passe et fait monter notre stress, ce qui augmente la production de cette hormone», explique Adrian Ionescu, directeur du Nanolab.

Bien que le cortisol nous aide à faire face à un épisode stressant, il est à double tranchant. En temps normal, sa sécrétion suit un rythme circadien: elle est au maximum entre 6h et 8h, puis diminue au fil de la journée. «Chez les personnes touchées par les maladies liées au stress, le rythme circadien du cortisol est complètement déréglé», souligne Adrian Ionescu. «Que l’on parle de production excessive ou insuffisante, ce déséquilibre peut avoir des conséquences néfastes sur la santé: obésité, maladies cardiovasculaires, dépression ou burn-out».

Capturer l’hormone pour l’analyser

Pour mesurer le cortisol de façon ponctuelle, on peut avoir recours à des analyses de sang. Néanmoins, on peut aussi le trouver en quantité détectable dans la salive, l’urine ou la sueur. C’est cette dernière que l’équipe d’Adrian Ionescu a choisi d’exploiter, en mettant au point un capteur minuscule qui peut s’intégrer dans un patch portatif intelligent.

Celui-ci est composé d’un transistor combiné avec une électrode à base de graphène, qui grâce à ses propriétés uniques, offre une très grande sensibilité et une limite de détection très basse. Ce matériau est fonctionnalisé avec des aptamères, des courts fragments d’ADN ou d’ARN simple brin capables de fixer certaines molécules. Lorsque l’aptamère, qui est chargée négativement, rencontre l’hormone, elle la capture instantanément puis se replie sur elle-même, ramenant ainsi la charge vers la surface de l’électrode. Ce mécanisme d’interaction entre l’aptamère et le cortisol permet au dispositif de détecter la charge et donc la concentration de cortisol dans la sueur.

Jusqu’à présent, aucune méthode ne permet une mesure en temps réel du rythme circadien de cette hormone. «C’est ici tout l’avantage et toute la nouveauté de ce capteur: grâce à sa dimension portative, on va enfin pouvoir chiffrer scientifiquement et objectivement certaines maladies liées au stress. Tout ceci de manière quasi-continue, non-invasive et avec une précision qui couvre toute la gamme de concentrations du cortisol», s’enthousiasme Adrian Ionescu.

L’ingénierie au service du médical

Après des démonstrations expérimentales très encourageantes en laboratoire basées sur la plateforme Lab-on-SkinTM de Xsensio SA, la prochaine étape est de mettre le capteur entre les mains du personnel médical. «L’équipe de R&D de l’EPFL et Xsensio a franchi une étape importante dans la détection de l’hormone cortisol», déclare Esmeralda Megally, CEO de Xsensio. «Nous sommes impatients de tester ce nouveau capteur en clinique et de découvrir de nouvelles informations sur le fonctionnement de notre corps». Un projet Bridge est en cours avec l’équipe de la professeure Nelly Pitteloud, qui dirige le service d’endocrinologie, diabétologie et métabolisme du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) afin de valider ce capteur non-invasif pour la mesure du cortisol en continu chez l’humain. Ce capteur a un potentiel médical majeur dans l’étude des rythmes physiologiques et pathologiques de la sécrétion du cortisol. Le projet Bridge se concentre notamment sur les sujets sains, les patients atteints du syndrome de Cushing (surproduction de cortisol) et de la maladie d’Addison (production non suffisante de cortisol), ainsi que sur les patients présentant une obésité liée au stress.

Quid des maladies psychologiques engendrées par trop de stress? «Actuellement, celles-ci ne sont déterminées que par des ressentis et des états, souvent subjectifs», estime Adrian Ionescu. «Avoir un outil technologique portable fiable qui nous permette de chiffrer objectivement une dépression ou un burn-out et l’efficacité de leur traitement en temps réel, par exemple, serait un grand pas en avant pour mieux les appréhender». Et qui sait, cette technologie se retrouvera peut-être dans les bracelets intelligents du futur. «La phase suivante se concentrera sur le développement de produits pour faire de cette invention un élément clé de notre plateforme de détection Lab-on-SkinTM et pour ajouter la surveillance du stress à la prochaine génération de technologies portatives», conclut Esmeralda Megally.

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