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Des interactions entre gènes et environnement à l’origine de l’autisme

Une équipe de l’UNIGE démontre comment gènes et environnement cellulaire interagissent dans les troubles autistiques, et explique ainsi la grande variabilité des symptômes de la maladie.

Peer-Reviewed Publication

Université de Genève

image: Medium Spiny Neuron located in the nucleus accumbens, one of the neural networks of the reward system. view more 

Credit: Camilla Bellone - UNIGE

L’équipe de Camilla Bellone, professeure au Département des neurosciences fondamentales de la Faculté de médecine de l’UNIGE et directrice du Pôle de recherche national Synapsy, avait déjà mis en évidence le rôle du système de la récompense dans le déficit d’interactions sociales chez des souris modèles de l’autisme. La motivation qui pousse les individus à interagir avec leurs semblables est en effet intimement liée au système de récompense, à travers l’activation des réseaux neuronaux qui le composent. 

Mais quels sont les mécanismes cellulaires et moléculaires à l’œuvre dans les réseaux neuronaux concernés, à l’origine des déficits d’interactions sociales? Pour comprendre ce processus et ainsi décrypter comment les symptômes apparaissent, les scientifiques ont étudié des souris dites hétérozygotes, c’est-à-dire porteuses d’une délétion d’une seule des deux copies du gène SHANK3 , mais ne présentant pas de troubles du comportement social. Avec 1 à 2 % de tous les cas d’autisme, il s’agit en effet l’une des causes monogéniques les plus fréquentes de la maladie.

«Les êtres humains ne présentent la mutation que sur une seule des deux copies de SHANK3, un gène essentiel au fonctionnement des synapses et à la communication entre les neurones», souligne Camilla Bellone. «Or, dans les modèles animaux de la maladie, la mutation d’une seule copie de SHANK3 n’affecte que légèrement le comportement des souris, ce qui explique pourquoi les phénotypes comportementaux observés ne sont pas homogènes.»

L’hyperexcitabilité neuronale en cause

Les chercheurs/euses ont tout d’abord inhibé l’expression de SHANK3 dans les réseaux neuronaux du système de la récompense afin d’identifier quels étaient les autres gènes dont l’expression était modifiée. Plusieurs gènes liés au système inflammatoire étaient concernés, et notamment l’un d’entre eux, Trpv4, impliqué également dans le fonctionnement des canaux de communication entre les neurones. 

«En induisant une inflammation massive, nous avons observé une surexpression de Trpv4, qui a alors entraîné une hyperexcitabilité neuronale en même temps que l’apparition de comportements d’évitement social que nos souris ne présentaient pas jusqu’ici», souligne Camilla Bellone. Or, en inhibant Trpv4, les scientifiques ont pu restaurer un comportement social normal. 

«Cela apporte la preuve que les troubles autistiques sont bien le résultat d’une interaction entre une susceptibilité génétique et un déclencheur externe— ici, une inflammation massive. L’hyperexcitabilité neuronale perturbe les canaux de communication altérant par conséquent les circuits cérébraux régissant les comportements sociaux.» Cela expliquerait aussi pourquoi une même prédisposition génétique peut entraîner, selon les facteurs environnementaux rencontrés et le type d’inflammation qu’ils déclenchent, une diversité de symptômes à la sévérité également variable.

Des dommages irréversibles pendant le développement?

Dans cette étude, l’inflammation était induite chez des animaux adultes. Or, le déficit de comportement social qui en a découlé était non seulement réversible, mais disparaissait naturellement au bout de quelques jours. «Nous devons maintenant reproduire nos recherches lors des phases critiques du neurodéveloppement – pendant la gestation et immédiatement après la naissance — afin d’observer l’impact de l’hyperexcitabilité sur les réseaux neuronaux en formation. Cela pourrait en effet endommager de manière irrémédiable la construction des réseaux neuronaux», indique Camilla Bellone.

Cette étude constitue la preuve de principe d’une causalité directe entre l’inflammation et l’apparition de symptômes comportementaux en présence d’une vulnérabilité génétique, et souligne l’importance des facteurs environnementaux, largement sous-estimés jusqu’ici. Elle met en outre en lumière le fait que la compréhension des mécanismes à l’origine des troubles autistiques doit encore être affinée pour pouvoir intervenir efficacement. En effet, selon les interactions gène – environnement et les mécanismes inflammatoires propres à chaque patient-e, il serait envisageable d’identifier un traitement qui correspondrait exactement à la modification cellulaire et moléculaire à l’œuvre dans les circuits cérébraux.


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